Bujumbura-Mairie : Rencontre CVR-UPRONA

Bujumbura-Mairie : Rencontre CVR-UPRONA

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Les membres de la Commission Vérité et Réconciliation, CVR viennent d’organiser une rencontre avec les leaders du parti UPRONA à Bujumbura ce jeudi 8 septembre 2022. Il s’agissait entre autre d’échanger, sous forme de rappel sur les missions et le mandat de la CVR, la question de la vérité et réconciliation au cœur de la politique burundaise, la planification, l’exécution et les types de violations commises au Burundi en 1972-1973, le rôle qu’aurait été joué par le parti UPRONA au pouvoir au cours de cette période.

Gérard Mfuranzima


Pour les responsables actuels du parti UPRONA, même si des citoyens innocents ont été massacrés en 1972 à l’époque où le parti était encore unique, il est inacceptable de lui faire endosser la responsabilité, comme l’a écrit la CVR dans son rapport d’étape 2021.

Le Président de la CVR, Amb. Pierre Claver Ndayicariye, lors de sa présentation et dans un film documentaire sur les réalisations de la Commission, les faits sont têtus, a-t-il précisé. Les hautes autorités de l’UPRONA de l’époque ont participé dans les massacres de 1972 et des preuves sont disponibles dans les archives de la CVR. Les témoins, rencontrés sur terrain, expliquent aux commissaires de la CVR que les Badasigana et la JRR ont joué un rôle clé dans la répression génocidaire et partagent des exemples nominatifs. D’anciens membres de la JRR ont déclaré à la CVR avoir été utilisés dans des traitements inhumains et dégradants.

Certains membres du parti Uprona présents à la réunion

La Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore, JRR, mouvement intégré de l’UPRONA a été utilisée comme groupe d’autodéfense… ratissant collines et buissons à la traque des ennemis imaginaires. Même dans son message du 18/9/1972, un leader de l’UPRONA à Bujumbura s’est vanté du succès obtenu dans la mobilisation des militants en mai 1972.

Dans toutes leurs interventions, les membres du Parti UPRONA ont refusé tour à tour toute responsabilité du parti de Rwagasore dans le génocide de 1972. Pour le Président du Parti, Olivier Nkurunziza, l’UPRONA ne doit pas être comptable des tueries de 1972, car, ce parti ne pouvait pas laisser tuer les siens, dont ses propres dirigeants au plus haut sommet. Le parti avait été accaparé par des militaires membres du Conseil Supérieur de la République. D’où il faut aller chercher la responsabilité chez le Président Micombero qui s’était autoproclamé Président du parti, a-t-il souligné.

Certains commissaires de la CVR présents à la réunion

D’autres interventions des membres du parti UPRONA ont clairement indiqué que le parti ne peut pas accepter d’être taxé de génocidaire, qu’à cette époque il régnait un désordre en son sein, qu’il n’y avait pas de réunions statutaires, que la jeunesse du parti a été instrumentalisée, que le virus de la division génocidaire est à chercher dans la colonisation et que les responsabilités dans les massacres de 1972 soient plutôt établies individuellement. « On ne construit pas la paix en culpabilisant abusivement l’UPRONA », a dit Concilie Nibigira, ancienne Présidente de cette formation politique.

Pour conclure, le Président de cette séance, Amb. Pierre Claver Ndayicariye a rappelé que la vérité sur le génocide de 1972 est lourde : « Oui, cette vérité a été cachée pendant près de 50 ans, mais elle devra éclater au grand jour grâce à la contribution de tout en chacun, aux enquêtes, auditions, exhumations et archives. Oui, des acteurs de la crise ont même témoigné devant la Commission. Oui, ce que la CVR découvre étonne plus d’un : des orphelins de 1972 souffrent d’avoir perdu des parents, mais des enfants des auteurs des crimes souffrent aussi en apprenant ce qu’ont fait leurs parents ». Pour lui, c’est une obligation légale d’établir les responsabilités : celles des institutions, celles des individus et celles des organisations.

Mais que l’UPRONA n’ait jamais dénoncé les tueries massives de 1972, ni montré les fosses communes qui ont englouti des milliers de Burundais, l’interrogation est restée entière pour le secrétaire de la CVR, Madame Léa Pascasie Nzigamasabo.

Cette réunion d’échange entre les leaders du parti UPRONA et les membres de la CVR s’est clôturée dans un climat de confiance mutuelle et les deux se sont quittés en se promettant de continuer leur réflexion pour que le rapport définitif de la Commission reflète la Vérité dans toutes ses facettes.

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