Des femmes et des filles ont été violées lors de la crise de 1972

Des femmes et des filles ont été violées lors de la crise de 1972

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La tragédie de 1972 n’a pas été seulement marquée par des assassinats et disparitions de victimes. Dans la province de Makamba comme partout ailleurs dans le pays, les auditions menées par la CVR lors des activités d’exhumation d’août à octobre 2020 ont montré qu’il y a eu aussi de nombreux cas de viols commis sur des femmes et des filles. Ce que la CVR considère comme l’une des violations des droits humains.

La Commission Vérité et Réconciliation a mené des activités d’exhumation des restes humains de la crise de 1972 dans trois communes de la province de Makamba. Il s’agit de la commune Makamba, Vugizo et Mabanda.
Les collines cibles ont été entre autres : Karinzi, Butambasha, Butanyerera, Mubondo, Musebeyi et Kigamba dans la commune de Mabanda ; Gikuzi, Rabiro, Martyazo, Jongwe, Rutegama, Murinda et Mazuru de la commune Vugizo, ainsi que Munonotsi, Nyange, Muvumu, Murenge, Coganyana et Kanzege de la commune Makamba. La CVR s’est également rendue en commune Kayogoro, plus précisément sur la colline Kididagi. Mais, le charnier renseigné dans cette localité avait déjà été exhumé.

La CVR a appris que les crimes commis depuis fin avril jusqu’en juillet 1972 visaient principalement les hommes, mais des femmes ont été aussi tuées, selon les témoins qui ont accepté de se confier à la Commission. Preuve à l’appui, dans une fosse commune de la colline Munonotsi, la CVR a excavé des restes d’une femme attachée à un enfant. L’image montre que la mère essayait de protéger son enfant, mais en vain.

Les témoins oculaires de la crise de 1972 ont pointé du doigt des membres influents du parti UPRONA et de son mouvement de jeunesse, la JRR (Jeunesse Révolutionnaire de Rwagasore).

Des atrocités dans le reste du pays
Au centre et au nord, de nombreux témoins ont accusé ces jeunes d’avoir dénoncé et arrêté des personnes à tuer, accompagné les automobiles transportaient les victimes vers les centres de rassemblement et de détention (Prison centrale de Gitega et celle de Murembwe en commune Rumonge), ou encore vers des fosses communes déjà creusées par des tracteurs. La CVR a déjà à ce jour exhumé plus de 10 mille victimes de la province de Gitega sur les sites de la Ruvubu, Mutobo, Nyabunyovu et Nyambeho.

Les témoignages recueillis par la Commission montrent que les jeunes de la JRR bénéficiaient du soutien des militaires. Les témoins oculaires trouvés sur la colline Gitaba dans la province Makamba ont révélé une autre réalité pernicieuse : des femmes et des filles contraintes d’offrir des faveurs sexuelles aux malfaiteurs lors des soirées dites de vigilance. Ainsi, elles devaient leur préparer de la nourriture et griller des arachides. Les meurtriers, après s’être régalés de boissons, finissaient la journée par des actes sexuels sur les femmes et les filles, ont indiqué les témoins.

Enfant sans père, un enjeu pour l’héritage familial
Les mêmes témoins ont rapporté à la CVR que parmi les femmes et les filles violées pendant cette période, certaines d’entre elles sont tombées enceintes et ont eu des enfants non reconnus par leurs géniteurs. Même à ce jour, cela constitue un problème majeur dans la société suite au manque de terres arables, étant donné que ces enfants réclament d’hériter dans les familles maternelles parce qu’ils ne connaissent pas leurs familles paternelles.

Ainsi, des familles se sont retrouvées dans des difficultés liées à la gestion de ces enfants sans pères biologiques connus. Elles sont alors forcées de partager à contre cœur le peu de terres cultivables à leur portée car, ces enfants sont déjà adultes et doivent fonder leurs propres familles, malgré toutes ces difficultés.

Par ailleurs, les problèmes ne se limitent pas à la succession des biens familiaux. Les familles des survivants n’ont pas été autorisées à organiser des cérémonies de deuil. Un témoin de Makamba a raconté à la CVR que quiconque osait organiser une cérémonie de deuil était considéré comme un traître (umumenja). Cette personne devait être corrigée brutalement avec le risque de ne pas revenir à la maison. (Uwihenze akagandarira uwiwe, bamwita umumenja. Yaragenda ntiyagaruka !)

Willy Ntakarutimana

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