GENOCIDE DE 1972-1973 : Les victimes et les rescapés du génocide sont toujours sous le choc du passé

GENOCIDE DE 1972-1973 : Les victimes et les rescapés du génocide sont toujours sous le choc du passé

Rose Karambizi Ndayahoze, épouse de feu Commandant Martin Ndayahoze, se souvient toujours de la tragédie qui a coûté la vie de son mari et de celle de nombreux innocents Burundais. Son mari Ndayahoze, un officier militaire Muhutu, n’est plus revenu chez lui après avoir reçu un appel téléphonique de la part d’une autorité militaire lui recommandant à rejoindre l’Etat-major.

De l’autre côté du fil, c’était Thomas Ndabemeye, le Chef d’Etat-major lui-même qui l’appelait. Il lui a dit qu’une guerre s’est déclenchée, l’invitant ainsi à rejoindre ses compagnons d’armes. Le jour suivant dans l’après-midi, sans aucune nouvelle de son mari, Rose Karambizi Ndayahoze affirme avoir vu un officier de l’armée venir avec un mandat de perquisition. Elle n’a pas eu la chance d’expliquer que son mari était aussi un officier.  Cela n’était que le début de son chemin de calvaire.

La maison a été confisquée, dit-elle et les comptes bancaires bloqués. Dépourvue de tous les biens de la famille et sans aucune assistance, Rose Karambizi Ndayahoze est devenue un sans abri qui se battait non seulement pour survivre face à la pauvreté mais aussi pour échapper la persécution menée par les agents de la sureté qui la traquaient partout où elle semblait se faufiler.

Quid de Simbananiye Arthémon?

«Arthémon Simbananiye était le planificateur de tout ça. C’est lui qui s’est aussi chargé de rapatrier Ntare V pour créer une confusion. Nous nous demandions ce qui se passait quand nous voyions des Bahutu en train d’être tués, expliqua-t-elle, Mais Arthémon avait aussi tué des Batutsi par exprès pour brouiller les pistes. Effectivement il avait ciblé les Batutsi à tuer pour dévier l’attention afin de commettre le génocide contre les Bahutu.»

Se marier avec un Muhutu était un acte de trahison, selon le témoignage de Germaine Nahimana

Tout comme Rose Karambizi Ndayahoze, Germaine Nahimana, une femme Mututsi, a vécu des malheurs presque pareils pour s’être mariée avec un muhutu. Son mari a été assassiné et la maison de famille et toute autre fortune ont été spoliés. Elle aussi a été qualifiée de traitresse et laissée seule au milieu des ténèbres de la mort de son enfant survenue alors qu’elle n’avait même un vieux tissu pour couvrir son corps.

Germaine Nahimana porte encore aujourd’hui les cicatrices des malheurs vécus en 1972. «J’ai passé la nuit seule avec le cadavre qui était emballé dans un carton. Je craignais que ce corps puisse se décomposer, mouiller et détruire le carton». Selon toujours son témoignage, les gens ont été massacrés en raison de leur appartenance ethnique.  Même ses frères et sœurs ont refusé de lui apporter une assistance car il était strictement interdit de porter secours à une femme mututsi mariée à un muhutu.

Suzanne agissant comme son futur mari

Elève à l’Ecole moyenne pédagogique des filles de Buhiga en 1972, Nyandwi Evangeline et ses camarades bahutu ont senti la dernière heure venir. Une situation de conflits a éclatée à cette école. Les listes des personnes à exécuter avaient été élaborées. Parmi les élèves de la dite école figurait Suzanne Nyarushatsi, la fiancée de Simbananiye, affirme Nyandwi Evangeline qui atteste qu’elle-même figurait sur une liste spéciale des éléments qui devaient être éliminés dans l’immédiat.

Dans l’espoir de rejoindre sa famille à Rumonge, en passant par Matana, c’est à Kiremba que le rêve est devenu un cauchemar. Suzanne Nyarushatsi, la future épouse de Simbananiye, qui était avec eux dans la voiture a alerté les militaires pour s’en prendre à Nyandwi Evangeline et ses deux camarades. Avant leur exécution, elles ont été détenues dans des cachots du camp militaire de Bururi où le responsable était le Commandant Samuel Nduwingoma. Celui-ci les livraient aux tortures et viols, selon toujours Evangeline. Par miracle, le directeur du lycée Kiremba, Henry Stalgren de nationalité suédoise, est intervenu et les a arrachées du danger de mort. Elles ont été sauvées mais les cicatrices restent greffées dans leurs mémoires

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