Rutana : Bukemba, zone cible des militaires, des mulelistes et des habitants de la région de Mugamba

Rutana : Bukemba, zone cible des militaires, des mulelistes et des habitants de la région de Mugamba

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Certains des témoins sont des hommes affiliés au mouvement politique Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore (JRR), du parti Uprona en cette période de crise. Autour du feu (igicaniro) sur les barrières de la colline Bugiga-Kimanga, ils se sont vu confier la mission d’enregistrer le numéro d’immatriculation de chaque voiture qui empruntait ce chemin. Les militaires du camp de Rutana, dans les camions, leur demandaient s’ils connaissaient les victimes arrêtées pour qu’ils n’aient aucun doute sur le fait que ces victimes allaient être tuées ; l’exemple étant celui d’un enseignant nommé Gasuma qui enseignait à Butare.


Et les autres victimes devraient porter des malles contenant les munitions des fusils de ces militaires. Ils ont été emmenés vers la rivière Mutsindozi où ils ont été tués. Leurs corps ont ensuite été jetés dans cette rivière, selon ces témoins. Les autres rivières dans lesquelles les corps des victimes ont été jetés sont Musasa et Nyabihere.

Province Rutana commune Bukemba : Visite guidée des professionnels des médias sur le site CVR à Bukemba

Sur les rives de la rivière Nyabihere, 3 hommes qui allaient travailler à l’ISABU ont été tués par un groupe de personnes armées qui, selon ces témoins, étaient des combattants « mayi-mulele », portant des herbes sur la tête. L’ attaque a eu lieu juste au début de la crise et ces combattants venaient de l’ex-Zaïre devenu aujourd’hui le RD Congo.
Mais cette attaque qui a duré deux jours n’a pas continué car les militaires sont rapidement intervenus ; mais les combattants dont l’arme de calibre était la machette n’ont pas pu résister au fusil. Ils ont été réduits en cendres et ceux qui ont survécu à cette attaque se sont repliés impuissants vers le Congo, rassurent les témoins de la CVR. Et la paix est ainsi revenue dans la localité.


Il faudra attendre 1973 pour que les tensions reprennent à Bugiga-Kimanga et dans toute la zone de Bukemba. Les militaires ont emmené des personnes Bahutu sélectionnées dans les autres catégories socio-ethniques du Burundi pour aller les tuer au bord de la rivière Musasa.

         La CVR a exhumé des victimes dans la province de Rutana

Ces derniers étaient invités à aller dépanner la voiture d’un capitaine de l’armée au bord de cette rivière mais en vain. Ces personnes étaient ensuite tuées sur place et jetées dans la fosse laissée par la société « EDERI » qui creusait le sable tout près de la rivière. La CVR a excavé une fosse commune à cet endroit. Le nombre de victimes exhumées dans toute la province de Rutana s’élève à 512 sans compter les autres dont les corps ont été jetés dans ladite rivière comme le disent des témoins.


Les Bahutu qui ont survécu sont ceux qui ont pris la fuite vers les pays voisins, notamment la Tanzanie. Pour ceux qui ne voulaient pas quitter le pays, ils ont été attaqués par des « Batutsi » venus de la région du Mugamba. Ces personnes, armées de bambous pointus et de lances ont été particulièrement dangereux dans cette localité.

Excavation d’une fosse commune au chef-lieu de la province Rutana

Les survivants Bahutu, menant une vie de misère dans des camps de réfugiés en Tanzanie, ont du attendre le coup d’État du président Jean Baptiste Bagaza contre Michel Micombero en 1976 pour retourner au Burundi. Et pour les Bahutu assassinés, leurs maisons étaient occupées par des Rwandais, vivant ainsi sur dans le site devenu actuellement des paysannats et une source de conflits fonciers dans le pays. Parmi les doléances de la population locale figure en bonne place la restitution des biens spoliés à cette époque.

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